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Distillation hybride à l’hydrogène : des expérimentations prometteuses pilotées par la maison Hennessy

Engagée dans une démarche de diminution de ses émissions de gaz à effet de serre (GES) et visant un objectif de réduction de 50 % à horizon 2030, la maison de cognac Hennessy explore et investigue le champ des possibles pour à la fois optimiser et verdir ses consommations énergétiques.

Une démarche globale, de la vigne au produit fini

Vignoble, distillation, transport, emballage, toute la chaîne de production est analysée sous ce prisme depuis 2006, année du premier bilan carbone de la maison, permettant depuis de suivre l’intégralité de ses émissions. En son sein, la distillation, « gros porteur » d’émissions de GES – soit 16 % des dépenses énergétiques liées au cycle de production Cognac (dont 85 % dues à la combustion) – fait l’objet d’une attention toute particulière de la maison au bras armé.

Si l’optimisation des infrastructures amorcée depuis plus de deux décennies (préchauffage des vins, optimisation des réglages de combustion, plan d’installation de brûleurs nouvelle génération…) avait déjà permis de réduire les consommations de gaz de 20 % au sein des trois distilleries propriété de la maison, c’est par des innovations de rupture qu’une marche supplémentaire doit désormais être franchie, soit en investiguant le terrain de la recherche.

   

Un programme de R&D dédié aux énergies en distillation

Comme l’explique Felix Pouyanne-Lafuste, responsable des distilleries au sein de la maison, c’est en 2018 que la maison Hennessy a renforcé les moyens mis en œuvre en lançant son programme de R&D dédié aux énergies en distillation.

Après une thèse sur les économies d’énergie initiée en 2018 puis, en 2020, un passage à des contrats 100 % gaz vert (biométhane local provenant d’une unité surgérienne), c’est sur le terrain de l’hydrogène, dès 2019, que la maison a porté son attention, à une époque où « peu de monde s’intéressait à cette ressource », pourtant couverte par le spectre du cahier des charges de l’appellation.

 

▸ Des expérimentations en cours sur la distillation hybride à l’hydrogène

C’est alors en partenariat avec un fabricant d’électrolyseurs (la société Bulane) et un laboratoire spécialisé en combustion que la maison Hennessy a démarré son expérimentation de l’usage de l’hydrogène en distillation, d’abord sur banc d’essai, avant de distiller une première fois, en février 2022, ses premiers volumes dans un alambic de 12 hL. Fondé sur le principe de l’hybridation, le brûleur de la chaudière est alimenté par un mélange composé – à date – de 80 % de gaz naturel et de 20 % d’hydrogène en moyenne.

Singularité et point d’intérêt supplémentaire du dispositif, l’hydrogène est produit par électrolyse sur site, avec de l’électricité verte, ne posant la question ni du transport ni du stockage de ce gaz, produit et consommé en continu.

Côté qualité, les premières dégustations sont prometteuses, validées par le comité de dégustation de la maison, avec des résultats restant à confirmer à l’issue des prochains essais démarrés en novembre de cette année, toujours sur une chaudière de 12 hL.

Cherchant à trouver des solutions adaptables sur l’ensemble des structures, le début du déploiement de l’hybridation, escompté pour la campagne 2025 ou 2026, présente l’avantage de se faire avec un changement limité de matériel, permettant alors de maîtriser les coûts d’investissement sur les exploitations. C’est d’ailleurs dans ce cadre que les équipes mettent en place, en parallèle, des essais sur l’hybridation hydrogène-propane.

L’expérimentation sur ce dernier, dont l’utilisation est très répandue chez les bouilleurs de cru à domicile, permet ainsi de couvrir tout le scope des opérateurs de l’appellation. Amorcés en 2022 à l’échelle laboratoire, les essais pourraient être poursuivis en 2023 ou 2024 chez un partenaire de la maison.

 

▸ Un objectif à horizon 10 ans : une distillation cognac 100 % à l’hydrogène

Sur le plus long terme (8 à 10 années), la maison envisage une distillation 100 % à l’hydrogène qui passera par un travail de montée en puissance du taux d’hybridation, et nécessitera alors un changement d’équipement. Les premiers brûleurs spécifiques testés l’année prochaine sur bancs d’essais nécessiteront d’être éprouvés avant, afin de trouver les bons réglages, de maîtriser les spécificités de cette combustion totalement hydrogénée, mais aussi pour le coup 100 % décarbonée, pour passer, ensuite et en temps voulus, à l’échelle de la pratique.

 

Nina Couturier

Cet article vous est proposé par Le Paysan Vigneron, rencontrez-les HALL 1 Stand A2101 sur le salon.